Rav Oury Cherki
Pessah - Même si nous étions tous sages
Une lettre aux Noahides
Publié sur le site du Centre Noachide Mondial
Dans la Haggadah (récit de Pessa’h) nous trouvons à deux reprises des questions posées par l’un des enfants: ma nichtana (pourquoi cette nuit...) et les quatre fils. Chacune de ces séries de questions est accompagnée de sa réponse. La réponse à la question "En quoi cette nuit est-elle différente de toutes les autres nuits?" est: "Esclaves de Pharaon, nous étions en terre d’Egypte. De là-bas, Lui notre Dieu nous a fait sortir", alors que la réponse aux "quatre fils" est: "Avant que tout n’ait commencé, nos ancêtres servaient les dieux des autres. Maintenant, Lui, le Dieu du monde, a fait de nous les proches de sont service". D’un point de vue historique, il s’agit de deux récits distincts. Il s’agit de la contoverse dans le Talmud (T.B. Pessa’him 116a) entre Rav et Chmouel si la réponse à donner au fils doit être "Esclaves nous étions" ou "Avant que tout n’ait commencé, nos ancêtres servaient les dieux des autres".
L’on peut dire que la discussion porte sur l’essence de la délivrance d’Egypte. Est-ce que le principal est la libération nationale ou faut-il y voir une dimension religieuse, de passage de l’idolâtrie au service de Dieu. Le peuple d’Israël témoigne par là qu’il n’y a pas de distinction entre la libération nationale et la libération spirituelle. Il ne peut y avoir l’un sans l’autre. Malgré cela, le peuple d’Israël a décidé que ce serait la réponse "Esclaves nous étions", soit le côté national, qui viendrait en premier, indiquant que la priorité est de s’assurer la libération de l’esclavage politique, entraînant ainsi la libération de l’esclavage spirituel, et non l’inverse.
Cela est sous-entendu dans la partie du Maguid (récit): "Quand bien même serions nous tous hommes de sagesse, intelligence et connaissance de la Thora – c’est un devoir pour nous de faire le récit de la sortie d’Egypte". Il y a lieu de poser la question: existe-t-il une Mitsva (commandement de la Thora) dont les sages seraient exemptés pour qu’il faille préciser qu’ici ils y sont malgré tout astreints comme tout le monde? Non, la raison de leur inclusion est qu’il y avait lieu de penser que ne doivent remercier d’être sorti d’Egypte que ceux pour qui le joug de l’exil est une grande souffrance. Mais pour les sages d’Israël, qui sont consolés par leur Thora et ainsi ne ressentent la difficulté de l’asservissement, il se pouvait qu’ils soient exemptés du récit de la sortie d’Egypte vu qu’il ne les concerne pas. C’est pourquoi la Haggadah indique que ce n’est pas le cas. Car en réalité l’on ne peut être hommes de sagesse, intelligence et connaissance de la Thora tant que l’on se trouve sous l’asservissement des nations. Croire qu’il peut y avoir un Enseignement (Thora) sous le gouvernement des nations n’est qu’une illusion, comme l’ont dit nos sages du Talmud (T.B H’aguiga 5b): "Il n’y a pas de plus grande annulation de la Thora que l’exil d’Israël".
Nos sages nous ont également enseigné qu’il fallait s’occuper beaucoup de la sortie d’Egypte: "quiconque abonde en récit de la sortie d’Egypte, ajoute à sa louange". Cela ne signifie pas qu’il faille juste multiplier les récits de ce qui a été, mais également en tirer les leçons pour nous permettre de sortir de différentes sortes d’Egypte. C’est ce qu’ont fait les sages "accoudés ensemble au seder de Bené-Berak faisant leur récit de sortie d’Egypte - toute cette nuit-là", la nuit dans laquelle ils se trouvaient, le joug romain. Et nous aussi, nous avons appris d’eux d’espérer notre sortie d’Egypte, celle qui se déroule depuis la création de l’Etat d’Israël.
Joyeuse fête de Pessa’h au monde entier,
Oury Cherki