Rav Oury Cherki

Le Clal et la Aggada chez Rachbetz

Nissan 5770



La Thora est vécue comme la constitution du peuple d’Israël organisé en nation sur sa terre. On comprend ainsi pourquoi les mitzvoth sont présentées dans la Thora comme devant être accomplies tout d’abord en Eretz-Israël et auxiliairement en galout: "Je vous ai enseigné des préceptes et des lois… afin que vous les accomplissiez sur la terre ou vous entrez pour la posséder" (Devarim IV, 5; Ramban au nom du Sifré, Rachi sur Devarim XI, 18). Cela explique aussi l’importance des lois décidées par la communauté. En effet, les poskim, en particulier nos maitres d’Espagne (responsa du Roch 6, 8), ont insisté sur l’obligation pour un individu de se plier au takanot de la communauté, parce que la communauté est le reste de la souveraineté d’Israël (Méiri sur Sanhédrin). Notre maitre Rachbetz (I, 123) affirme que les décisions de la communauté sont valables même pour le membre qui était absent lors du vote. La preuve fournie par Rachbetz est tirée d’une aggada (Tan’houma Vayéchev, 2) selon laquelle les fils de Yaacov ont interdit par anathème de révéler la vente de Yossef, et que même Reouven, qui était absent lors de la décision, était tenu de respecter l’interdiction. Il est remarquable de voir qu’un argument de Halakha est tiré du Midrach, de la littérature de la Aggada, qu’on hésite souvent à introduire dans des considérations de Halakha. Il me semble qu’il y a un rapport entre la conscience de la valeur du Clal et l’unité de la Halakha et la Aggada qui apparait chez nos maitres. Ce sont en effet deux des caractéristiques du Talmud d’Eretz-Israël, le Yerouchalmi. Le parfum de l’époque de notre indépendance nationale n’avait pas disparu chez nos maitres, et trouvait son expression dans leur enseignement.